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Où trois journées à forte teneur musicale vous transforment en ballon à l’hélium

 

Premiers concerts depuis deux mois et je redécouvre coup sur coup 1) le pied pas possible qu’on prend le soir en rentrant chez soi et en découvrant ses photos sur écran, et 2) le gros ras-le-bol qui vous tombe dessus au terme de plusieurs heures passées à bidouiller sous Photoshop pour sélectionner/retoucher/mettre en ligne. C’est quand même largement le 1) qui prédomine, mais j’avoue que dans la mesure où j’ai fait fort au niveau du volume cette semaine, mon temps de travail en a légèrement pâti. Comme on dit : demain, j’arrête. Jusqu’à la prochaine fois. Mais ça en valait la peine.

 

J’attendais le festival Fargo All Stars avec impatience : l’affiche était très belle, entre les artistes que j’attendais de revoir et ceux que j’étais curieuse de découvrir. Sans compter que c’est toujours un plaisir particulier de revenir deux soirs de suite dans la même salle : pendant la journée qui suit, c’est comme si on n’en était pas réellement parti.

 

Les deux seuls sets que je n’ai pas tenté de photographier sont aussi les deux qui m’ont le moins marquée. Olle Nyman, de la folk sympa mais relativement classique. Et Chris Garneau qui avait visiblement ses fans. Il faut reconnaître qu’il a sa griffe, que ses chansons sont plutôt jolies dans un genre rêveur et mélancolique, mais ce n’est pas trop mon truc. Le fait qu’il m’ait été quasiment impossible de le voir derrière son piano depuis ma place au premier rang n’a pas dû aider à me faire entrer dans l’ambiance.

 

Bilan un peu mitigé en ce qui me concerne pour Jesse Sykes & The Sweet Hereafter. J’ai déjà dit ici à quel point j’ai été chamboulée par l’album Like, love, lust and the open halls of the soul qui a entre autres nourri la nouvelle « Fantômes d’épingles » de mon deuxième recueil et inspiré un autre texte encore inédit, « L’été dans la vallée ». Sur scène, je trouve le groupe plus inégal. Peut-être parce que les arrangements sont moins subtils, la voix étrange de Jesse moins mise en avant, toujours est-il que la sauce ne prend pas de la même façon. J’ai trouvé le concert en dents de scie, avec quand même de très beaux moments – comme une version de Spectral beings accompagnée de cordes, qui retrouvait l’ambiance grave et mystérieuse qui rend la chanson si belle sur disque. Malgré mes réserves, j’ai toujours plaisir à revoir le groupe. Sans compter qu’il planait dans l’air une question en attente dont la réponse m’a été fournie un peu plus tard ce soir-là – j’y reviendrai plus loin.

 

Joseph Arthur, qui passait juste après, m’a soufflée. J’irais jusqu’à dire qu’il a cassé la baraque. Je l’avais vu une fois, mais de loin et dans des conditions particulières comme je l’expliquais récemment : j’étais tombée dans les pommes pendant le set précédent et avais regardé le sien d’un œil distrait. Je me rappelais un grand type au crâne rasé qui jouait en solo une musique globalement très calme. Huit ans plus tard, je retrouve un très grand type à l’allure pas possible, aux cheveux en bataille, entouré d’un groupe et dont les chansons donnent une pêche incroyable. Pour avoir un peu écouté l’album Come to where I’m from sans y accrocher totalement, je savais qu’il s’agissait d’un grand bonhomme – la chanson History, que j’ai beaucoup écoutée en boucle, suffisait à me le prouver. Je ne pensais pas pour autant le voir aussi à l’aise en live. Malgré la configuration assise de la Cigale, j’ai vu des gens danser debout sur les côtés de la scène.


La jolie surprise du festival a été pour moi Clare & The Reasons. J’avais écouté distraitement l’album The Movie sans trop savoir si cette pop aérienne et mélodique me plaisait. Je me suis aperçue pendant le concert que je l’avais mémorisé bien mieux que je ne le croyais – les trois quarts du temps, j’étais toute guillerette de reconnaître les morceaux. Pluto et Rodi en particulier sont entêtantes et jolies comme tout. Clare Muldaur tout de rouge vêtue, avec ses allures de starlette hollywoodienne, est charismatique à souhait. J’ai été frappée par la ressemblance physique entre elle et Shara Worden qui allait lui succéder un peu plus tard. Ça tient peut-être à leur goût pour les coiffures sophistiquées et les tenues recherchées, mais elles partagent en tout cas le sens du spectacle – en plus de partager un groupe sur cette tournée commune.

 

Et My Brightest Diamond… La grâce à l’état pur. Ça ne s’explique pas, ce que fait Shara Worden sur scène, il faut le vivre pour comprendre. J’ai remarqué à plusieurs reprises une connivence entre les gens qui ont vu et aimé ses concerts, comme une étincelle dans le regard. On sait qu’on a vécu quelque chose de magnifique qu’on est incapable d’expliquer, mais on sait aussi que la personne qu’on a en face comprend. On sait qu’on est en admiration béate devant ce minuscule bout de femme gentiment allumé. Une petite fée espiègle au sourire irrésistible et dont la voix prend une ampleur impressionnante en concert. Elle est heureuse d’être là. Sa joie est contagieuse, même lorsqu’elle ne dit rien – je l’ai trouvée beaucoup moins bavarde que lors du concert solo vu au Point FMR en avril, un des très grands moments de l’année pour moi. Elle joue une musique belle et grave qui se teinte de légèreté quand elle l’interprète sur scène. J’ai trouvé Dragonfly toujours aussi magnifique, j’ai adoré entendre en live Black and costaud, un morceau assez ludique dont les paroles en franglais sont tirées de L’enfant et les sortilèges. Et je ne peux plus entendre Apples sans l’imaginer en train de grimper dans un arbre (pour ceux qui n’ont pas suivi, l’explication en images ici).

 


Avant le concert, j’ai croisé Shara au stand de marchandises en train d’accrocher des T-shirts et d’installer tout un attirail comprenant deux chevaux en peluche. Je suis allée timidement la saluer en lui rappelant qu’on s’était croisées en avril pour filmer une session acoustique. Je suis restée quelques secondes comme une idiote sans arriver à lui dire à quel point ce qu’elle fait est magique, à quel point on sort de ses concerts en extase, tout juste capable d’aligner trois phrases et d’échanger quelques sourires. Mais on ne peut rien dire face à Shara Worden. On se contente de l’admirer.

 

Pour les Parisiens que ça intéresserait, My Brightest Diamond sera en Black Session mardi à la Maison de la radio. Les inscriptions sont encore ouvertes sur le site à l’heure où j’écris, et sinon, il y a souvent moyen d’assister aux Black Sessions en se faisant inscrire sur liste d’attente une fois sur place. Franchement, si vous avez l’occasion, n’hésitez pas : il faut voir ça au moins une fois.

 


Et l’épilogue de Fargo All Stars, ce mercredi. Il y avait un moment que j’espérais organiser une session Cargo avec Jesse Sykes mais la première tentative, en mai, avait échoué : Jesse était partante mais n’avait pas le temps. J’espérais que la deuxième serait la bonne. La demande était en attente et j’ai compris qu’il allait se passer quelque chose de chouette quand je suis allée parler à Jesse après son concert lundi soir. On échange quelques mots sur des histoires d’emploi du temps et voilà qu’elle me lance, tout enthousiaste : « We should do this in the graveyard ! » Petit moment de flottement. Je comprends quelques minutes plus tard que son hôtel se situe près du Père-Lachaise et que l’endroit la fascine.

 

La suite ? Elle sera sur vos écrans dans quelque temps.


 

Je dirai juste qu’on a vécu un moment irréel en plein milieu du Père-Lachaise, que ça devrait donner une jolie session, que c’était un bonheur de croiser Jesse dans des circonstances moins speed que d’habitude, de discuter avec elle et de la photographier à la lumière du jour. Elle est souvent très mal éclairée en concert, ce qui est dommage dans la mesure où elle est particulièrement photogénique. C’est cool, d’avoir un webzine musical comme jouet. C’est chouette de pouvoir balader une chanteuse qu’on aime bien dans les allées du Père-Lachaise et de l’écouter chanter pour trois pékins au milieu des tombes.

 

Tournons la page musicale pour parler écriture, salons et parutions. Prochain déplacement ce week-end, pour ma dernière grande expédition Bragelonne avant un moment : je serai au Mans pour la 25ème Heure du Livre, avec aussi Laurent Genefort, Ange et Adriana Lorusso. Pendant ce temps, à Paris, se tiendra le Salon de la revue, où sera présenté le premier numéro d’une revue baptisée Et donc, à la fin consacrée au fantastique et au sommaire de laquelle figure une de mes nouvelles, « Le jardin des silences ». Je sais que la revue sera disponible par correspondance sur un site encore en cours de construction et qu’il est possible également de la commander aux coordonnées données sur cette page. J’en reparlerai quand j’aurai plus de détails.

 

Ça me laisse deux jours pour redescendre sur terre. Certaines semaines où j’enchaîne les concerts, je me fais l’effet d’un ballon à l’hélium collé au plafond. Je crains que ça ne fasse que commencer.

 

 

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