Blog : juillet 2011

Bal populaire à Silent Hill

Je dois la découverte musicale la plus inattendue de la semaine à mes amis Michelle et Claudio, traducteurs sudistes chez qui j’ai passé quelques jours en villégiature. Un groupe de bal populaire toulousain qui fait danser le public sur une base de danses classiques (mazurkas, scottish) aussi bien que de rondes et de farandoles : sur le papier, ce n’était pas trop ma came. Quelques morceaux écoutés sur disque ne m’avaient pas totalement convaincue. La surprise n’en fut que plus belle dimanche soir, où j’ai vu Bombes 2 Bal jouer en plein air dans le village médiéval de Castelnau-de-Montmiral. J’ai toujours une légère méfiance vis-à-vis des groupes qui cherchent à impliquer activement le public : ça peut très vite sonner faux et plomber un concert. Mais rien de ça ici. C’est un spectacle populaire dans le meilleur sens du terme : convivial, festif et chaleureux, avec une vraie qualité musicale pour soutenir le tout. Le groupe a une sacrée énergie, vraiment communicative, et l’une de leurs meilleures idées consiste à laisser un couple de danseurs évoluer dans le public tout au long du spectacle pour guider les pas de danse. Ceux qui me connaissent savent que je ne suis pas facile à faire danser – non que je n’aime pas ça, mais il faut que je tombe sur la bonne musique au bon moment, et j’ai une sainte horreur des tubes des années 80 censés faire danser les foules. Mais ce bal populaire-là est franchement irrésistible (deux jours plus tard, mes mollets s’en ressentent encore douloureusement). Si vous voyez Bombes 2 Bal passer près de chez vous un de ces jours, foncez. Sans hésiter.

 

 

 

Quelques mots sur Silent Hill 3 pour poursuivre la saga, en attendant de recevoir The Room. Plus j’avance dans la série, plus je comprends pourquoi les fans parlent d’une mythologie interne au jeu. C’est particulièrement flagrant dans Silent Hill 3 qui fait directement suite au premier et continuer à développer le mythe d’Alessa Gillespie, cette fillette dotée de pouvoirs paranormaux, brûlée vive lors d’un rituel occulte orchestré par sa propre mère, puis plongée dans un cauchemar sans fin – une figure indissociable de l’histoire de la ville et de sa monstrueuse apparence. Si le début du jeu tranche avec les précédents, grâce à des décors différents (métro, centre commercial) et à un gameplay plus souple et moins répétitif, la dernière partie nous ramène sur les pas de Harry Mason, héros du premier jeu. Sa fille adoptive Heather, ayant progressivement découvert son histoire et accepté sa propre nature, refait en partie le chemin de son père, depuis un impressionnant combat contre le souvenir d’Alessa sur un inquiétant manège, jusqu’à l’exploration d’une sinistre chapelle où réapparaissent certains lieux mythiques du premier jeu : la chambre d’enfant d’Alessa avant le drame, mais aussi sa chambre d’hôpital. J’ai été frappée, dans cette dernière partie, par l’imagerie quasi christique associée à Alessa : les décors renvoient régulièrement aux images de son martyre, depuis les murs en flammes de la chapelle jusqu’aux fauteuils roulants et lits d’hôpital abandonnés dans les endroits les plus improbables. Sans parler de cette photo d’Alessa à sept ans, la première image que l’on découvrait dans le générique du premier Silent Hill et qui prend valeur d’icône à force d’apparaître dans le jeu. Si Silent Hill 3 souffre d’un scénario un peu long à se mettre en place et ne déploie toute sa richesse que dans la dernière partie, il se caractérise par une mise en scène inventive : dans la manière de filmer les combats (celui du manège est de toute beauté), mais aussi dans l’aspect visuel des lieux les plus cauchemardesques du jeu. Vers la toute fin, j’ai traversé plus d’une fois des pièces en courant tellement la vision des murs en train de se transformer et de se dissoudre à vue d’œil était oppressante. Une magnifique vision de l’enfer, mise en scène par une équipe qui considère le jeu vidéo comme un art à part entière plus que comme un simple divertissement (il suffit de regarder le making of disponible sur Youtube pour s’en convaincre).

 

Pour vous donner un aperçu de l’ambiance, voici une des scènes les plus marquantes du jeu, par son côté totalement improbable. Je l’ai vue reprise dans la bande-annonce de Silent Hill : Revelations, l’adaptation cinématographique du jeu qui sortira l’an prochain (avec notamment Malcolm McDowell dans le rôle de l’inquiétant Leonard Wolf). Et je me prends à rêver d’une adaptation qui bénéficierait cette fois d’un véritable scénario (quoique le travail nécessaire pour raccorder le scénario du premier film avec celui du troisième jeu relève du grand écart). Je reste persuadée qu’un grand film sur Silent Hill reste à faire.

 

 

 

 

Post navigation


L’abri des regards et le feu des projecteurs

 

Une brève note depuis mon bureau itinérant délocalisé pour quelques jours chez des amis traducteurs du Tarn (car le traducteur est un animal grégaire qui migre parfois vers d’autres nids), pour signaler un projet que je suis depuis quelques jours avec beaucoup d’intérêt. Laurent Gidon, auteur de fantasy publié notamment chez Mnémos (Djeeb le chanceur) et Le Navire en pleine ville (Aria des Brumes), vient d’ouvrir un blog consacré à la pré-publication en ligne d’un livre qui connaîtra plus tard une parution papier : L’Abri des regards. Il s’agit d’un ouvrage autobiographique relatant la dépression dont son père fut victime, et qui le conduisit au suicide, puis ses propres efforts à l’âge adulte pour ne pas suivre le même chemin. Trois chapitres sont en ligne à l’heure où j’écris ces lignes. L’écriture et juste et touchante, sans complaisance. Comme pas mal de gens, le sujet de la dépression me touche de près : j’ai connu ça aussi, je vis dans la trouille d’y retomber un jour, et plusieurs personnes de mon entourage en ont également souffert. C’est un sujet dont il est souvent difficile de parler, même avec les gens qui sont passés par là. Pas tellement à cause d’un tabou qui me semble beaucoup moins fort qu’avant, mais plutôt parce que la dépression prend des formes extrêmement diverses, et que chacun en fait une expérience qui lui est entièrement propre (ce qui la rend parfois d’autant plus difficile). L’ouvrage de Laurent Gidon m’intéresse d’autant plus à ce titre. L’adresse du blog : http://abridesregards.wordpress.com/

 

Sur un sujet pas tellement éloigné, j’ai été moi-même surprise d’être à ce point touchée par le décès d’Amy Winehouse appris hier soir. Je n’étais pas vraiment fan, et le personnage ne m’intéressait pas spécialement, mais je lui reconnaissais une très belle voix et quelques très bons morceaux. Mais je suis intriguée par la persistance du mythe rock’n’roll un peu malsain qui veut que les stars se consument le plus vite possible et meurent très jeunes. En apprenant la nouvelle, j’ai pensé tout de suite à Janis Joplin, pas à cause d’un quelconque rapprochement musical, mais simplement parce que j’ai été stupéfaite récemment de découvrir qu’elle aussi était morte si jeune – et visiblement, je ne suis pas la seule à y avoir pensé. La fascination qu’exerce ce cliché me laisse perplexe. Rien de flamboyant là-dedans : c’est juste une forme comme une autre de suicide, qui masque certainement une grande détresse. Chacun sa façon de l’exprimer, et si ça transforme certains en personnages un peu grotesques dont les frasques font les joies des tabloïds, il n’y a là rien de glorieux ni de risible. C’est juste moche de mourir à 27 ans, quelles que soient les circonstances et quoi qu’on puisse penser du personnage. C’est triste et moche, tout simplement.

 

Post navigation


Quand Sackboy s’amuse (à se faire peur)

Auguste lectorat, si tu permets que je t’appelle Auguste et que j’emprunte l’expression ™ à Lionel Davoust sans qu’il ne me réclame de droits, j’espère que tu me pardonneras mon silence de ces dernières semaines. J’ai passé mes journées immergée dans la traduction de Warbreaker de Brandon Sanderson (roman d’un tout petit million de signes, une paille comparé à Fils-des-brumes) et mes soirées perdues dans les méandres de Silent Hill 3 ou les grands espaces du très chouette jeu de western Red Dead Redemption. Le reste du temps, je me creuse la cervelle pour honorer deux commandes de nouvelles d’ici la fin de l’année. Bref, en l’absence de temps et/ou de motivation, vous aurez échappé entre autres à une entrée comparative sur les différentes reprises du plus beau générique de série de ces derniers temps, celui de Game of Thrones – la série est diffusée depuis moins de trois mois et voilà qu’il existe déjà une reprise métal, une autre au violon, et une version imitant les musiques de jeux vidéo 8 bits. Vous aurez aussi coupé à des réflexions brouillonnes sur des thèmes qui me travaillent pas mal, notamment l’inévitable schizophrénie qui me semble accompagner l’acte de création. En schématisant, comment gérer le fait que ce que l’on considère comme une qualité nécessaire chez un auteur soit aussi un défaut rédhibitoire chez un être humain, comment porter un regard différent sur le monde sans que ce regard finisse par être complètement tordu dans la vie de tous les jours, et autres questions du même genre. J’en reparlerai peut-être plus tard (ou peut-être pas), mais tout ça m’interpelle pas mal.

 

Mais ce n’est pas le sujet de l’entrée du jour. J’avais déjà parlé ici de Little Big Planet, jeu de plateforme mignon comme tout qui permet de créer ses propres niveaux, ce qui a permis à pas mal de joueurs de se lâcher de manière extrêmement créative. Je viens de découvrir qu’il existe notamment pas mal de niveaux revisitant des scènes de film, quand elles ne recréent pas carrément des classiques du jeu vidéo. Je suis tombée sur des niveaux inspirés par Les Simpson, Resident Evil, ou encore Super Mario :

 

 

 

 

Et surtout, là où je suis restée en arrêt devant l’inventivité de certains, c’est quand j’ai découvert le nombre de niveaux inspirés par Silent Hill. Notamment celui-ci, qui rejoue les dix premières minutes de Silent Hill 2 :

 

 

 

 

Pour ceux qui voudraient comparer, l’original est visible ici. Je suis aussi tombée sur un niveau qui met en scène un petit Pyramid Head mimi tout plein (pour ceux qui n’ont pas joué à Silent Hill 2, c’est un peu comme imaginer Freddy Krueger ou le Pinhead de Hellraiser représenté par un ours en peluche). Recréer un jeu à l’intérieur d’un autre jeu, comme mise en abyme, je trouve ça assez fort.

 

J’en entends certains grommeler dans le fond « Elle commence à nous gaver avec Silent Hill. » Mais ce n’est pas tous les jours qu’on se retrouve face à un authentique chef-d’œuvre du jeu vidéo qui continue à vous hanter des semaines après la fin. Je sais ne pas être la seule à penser qu’il y a un avant et un après Silent Hill, ni la seule qui ait eu du mal à en revenir ensuite. Voilà quelques jours que je joue à Silent Hill 3, et même si je le trouve excellent, moins répétitif que les précédents et extrêmement prenant, j’ai déjà le sentiment que le meilleur de la série est derrière moi et que rien n’égalera jamais la claque de Silent Hill 2, sa richesse ni sa puissance symbolique et psychologique. Mais j’espère me tromper.

 

  

Post navigation