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Quelques images nantaises de plus

Quelques images de plus pour compléter le compte-rendu des Utopiales. Il m’en reste encore pas mal à trier, mais essentiellement des photos du festival off, prises au restau ou au bar, donc pas forcément amenées à être postées ici. Avant de publier des photos de festivals ou de signatures, je me pose systématiquement la question « Qu’est-ce qui est public, qu’est-ce qui est privé ? » et la frontière est parfois un peu floue (ça vient généralement juste avant la question « Comment les personnes concernées se verront-elles sur cette photo ? »). D’autant que je sais que certaines personnes n’aiment tout simplement pas se voir en photo sur le Net. Du coup, j’hésite toujours pas mal avant de faire mon tri.


Tout ça pour dire aux personnes qui passent par ici et qui peuvent être amenées à s’y retrouver en photo : s’il m’arrive d’en poster que vous n’avez pas forcément envie de voir rendues publiques, n’hésitez pas à me le signaler et je les retirerai. Je parle de manière générale des photos passées, présentes et à venir, pas spécifiquement de celles des Utopiales. J’aime de plus en plus prendre les gens en photo, mais le but n’est vraiment pas d’emmerder les personnes concernées.

Xavier Mauméjean au téléphone.

Les auteurs anglophones en grande conversation : ici, Richard Morgan et Karen Miller.

Célia Chazel et Marianne Leconte relancent la mode du boa.

Hal Duncan, une photo de plus pour le fan-club féminin qui se reconnaîtra s’il passe ici.

Fabien Clavel présente à son éditrice un projet de manga, ou alors de fantasy animalière, on ne sait pas trop.

Fabrice Colin et Hal Duncan, pas très inspirés.

La Salle 101 délocalisée (de dos, Norbert Merjagnan).

Et pour finir : qui a donc collé cette affiche des « 3èmes Rencontres howardiennes » dans les toilettes pour filles de la Cité des Congrès ?

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En revenant de Nantes

 

Pour une fois, je suis plus d’humeur à poster des photos qu’à rédiger un long compte-rendu (même si, me connaissant, je vais sans doute me laisser entraîner une fois lancée). Il faut dire que cette année, aux Utopiales de Nantes, j’étais moins dans l’ambiance que d’habitude et j’avais du mal à discuter avec les gens. Si j’ai donné l’impression de snober certaines personnes à l’occasion, je m’en excuse, mais j’avoue que j’étais franchement à côté de mes pompes à certains moments. Un collègue charitable qui se reconnaîtra m’a dit avoir effacé la plupart des photos qu’il a prises de moi le premier soir au motif que j’y étais quelque peu cadavérique. Je veux bien le croire.

 


Il y a eu tout de même de très chouettes moments, comme toujours. Pour ceux qui ne connaissent pas les Utopiales, je précise que c’est un salon où je vais moins pour rencontrer des lecteurs – ce festival s’y prête beaucoup moins que les Imaginales d’Epinal par exemple – que pour retrouver des collègues et amis, français ou étrangers. C’est un festival que j’ai toujours trouvé très convivial de ce point de vue : j’ai toujours passé plus de temps à bavarder autour d’un verre qu’à suivre les conférences. C’est aussi un endroit où je commence à mesurer le passage du temps. J’y allais cette fois pour la neuvième fois – depuis 2000, je n’ai manqué aucune édition. C’est là-bas que j’ai compris pour la première fois l’an dernier que le milieu de l’imaginaire avait changé depuis que j’y suis entrée. Des gens sont arrivés, d’autres ont disparu de la circulation, des habitudes se sont installées puis ont disparu. Du coup, c’est un endroit qui a tendance à me rendre nostalgique (le fait que novembre soit aussi le mois de mon anniversaire, période propice aux bilans, y est sans doute pour quelque chose). Un détail tout bête m’a déboussolée ces deux dernières années : le soir, l’ambiance des Utopiales est différente de ce que je me rappelle des éditions précédentes. Avant, tout le monde dînait au restaurant de la Cité des Congrès, poursuivait la soirée au bar et ça se finissait souvent en room parties improvisées au Novotel tout proche. Du coup, les groupes se croisaient et se mélangeaient pas mal, ce qui donnait souvent lieu à de chouettes rencontres imprévues. J’ai l’impression que ça se divise beaucoup plus en petits groupes désormais, chacun partant dans son coin à l’heure du repas sans forcément recroiser les autres ensuite. Ça me manque un peu, ça faisait partie de ce que j’aimais le plus aux Utopiales. Je ne sais pas si c’est lié à ça, ou au fait que je connaisse forcément de plus en plus de gens sur place, mais j’ai l’impression d’avoir passé mon temps à croiser des collègues et amis sans jamais avoir le temps de discuter. Cela dit, comme je l’expliquais plus haut, je n’étais pas hyper réceptive de toute façon.

 

Les chouettes moments des Utopiales, donc… Je crois qu’un des plus jolis souvenirs est une discussion totalement inattendue avec Delia Sherman, que j’avais croisée à la dédicace d’Ellen Kushner chez Scylla et sur qui je suis retombée alors qu’on traînait du côté du stand ActuSF. On a parlé de tout et de rien, des États-Unis et de la Louisiane en particulier (on ne se refait pas), de l’ambiance des conventions – Delia était visiblement ravie d’être là, mais un peu déboussolée par le fait de parler tour à tour anglais et français et de rencontrer tant de nouvelles personnes en si peu de temps. Je regrette de ne pas avoir eu plus de temps pour discuter avec elle et avec Ellen Kushner, que j’ai ensuite recroisée en dédicace, mais je les ai trouvées aussi adorables et chaleureuses l’une que l’autre.

 

Autre rencontre brève mais amusante : l’énergumène hilare et filiforme, doté d’un accent écossais à couper au couteau, connu sous le nom de Hal Duncan. Je me rappelais l’avoir croisé en 2005 à la convention mondiale de Glasgow, en compagnie notamment de mon amie Florence Dolisi qui allait devenir la traductrice de son roman Vélum. Et devinez de quoi on a parlé ? Du concert d’Amanda Palmer qu’il avait vu récemment à Glasgow et qui l’avait beaucoup impressionné lui aussi. Il était très intrigué par un des numéros du concert et me demandait si on y avait également assisté : un des membres du Danger Ensemble se faisant couper les cheveux pendant une reprise du Hallelujah de Leonard Cohen. Il faut dire que je portais le même T-shirt que sur ce dernier « autoportrait en chambre d’hôtel » de l’année, d’où notre sujet de conversation.


Je garderai aussi un bon souvenir de la plus longue interview que j’ai accordée à ce jour : deux séances de deux heures chacune avec Richard Comballot, qui interviewait pas mal de collègues sur place (Jérôme Noirez passait juste après moi). J’adore les interviews longues et fouillées qu’il publie dans Bifrost, donc quand il m’a contactée pour m’en proposer une, j’ai accepté tout de suite. Le temps est passé très vite, d’autant que le personnage est vraiment sympathique et sait tout de suite vous mettre à l’aise. L’interview ne paraîtra pas avant un bon moment, mais ce sera sans doute courant 2009.

 


Et puis dans la série des traditions loufoques qui constituent parfois le festival off… Si vous traîniez aux Utopiales l’an dernier, peut-être avez-vous entendu des gens se saluer par l’expression énigmatique « Bras, coudes, genoux ». Laquelle est apparue dans au moins deux livres publiés cette année par des collègues qui fréquentent le festival, et je ne serais pas surprise qu’il y en ait d’autres. Elle provenait d’une nouvelle roumaine, parue dans une anthologie préfacée par Jeff Vandermeer, qui faisait l’objet d’une traduction que l’on ne peut guère qualifier que d’improbable. À feuilleter, c’était déjà un grand moment de comique involontaire ; lu par notre camarade Sylvie Miller avec l’accent roumain, c’est devenu carrément épique. Un de mes passages préférés, qui me fait toujours autant marrer, donne quelque chose comme : « Il y a Alanis Morissette sur MTV, je vais aller me réjouir. Ça y est, je me suis réjoui. » Non, ça n’a pas plus de sens replacé dans son contexte. Cette année, l’ami Christophe Duchet ayant trouvé un bouquin encore plus improbable, un livre d’histoire tchèque qui recense des faits n’ayant strictement rien à voir les uns avec les autres, Sylvie a donné une deuxième lecture (avec l’accent) en fin de soirée dans le bar des Utopiales, sous les yeux d’un public que vous voyez ici médusé (Stéphane Manfredo), attentif (Xavier Dollo) et hilare (Carina Rozenfeld). Pour ceux qui avaient manqué l’épisode précédent, il y a eu une nouvelle lecture de la nouvelle roumaine le lendemain. Il va falloir frapper très fort pour trouver un texte qui soit à la hauteur l’an prochain.


 

Quelques photos en vrac… À force de traîner dans les parages de Daylon, RMD et Jérôme Lavadou, ça donne forcément envie de mitrailler. Même si je ne peux pas m’empêcher de jalouser le rendu de leurs photos prises au reflex – j’adore mon G9, mais très clairement, ça n’a rien à voir.


Ellen Kushner en dédicace.


John Lang
alias Pen of Chaos du Donjon de Naheulbeuk.

Qui a donc conseillé des bières locales à Hal Duncan ?

Ça le fait bien marrer en tout cas.

Le matin au bar du Novotel, Alastair Reynolds et Richard Morgan font les geeks.

Isabelle Troin, collègue traductrice que je connais principalement par forum et blog interposés et que j’ai croisée trop brièvement.

Joëlle Wintrebert et ses lunettes qui brillent dans le noir.

Quelques grammes de finesse dans un monde de brutes : fin de soirée difficile pour Catherine Dufour et Jérôme Noirez.

And now for something completely different Enfin pas tant que ça. Je ne sais plus si j’ai déjà parlé ici de mes deux dernières parutions, donc je les mentionne au cas où. D’abord un texte très court dans le livre-anniversaire de la revue Khimaira, Les enfants de la chimère. La nouvelle s’intitule « Chanson pour la chimère » et reprend certains éléments de « Serpentine » (l’un des personnages est le tatoueur Zacharie). L’autre texte paraît dans le premier numéro d’une revue dont je viens tout juste de recevoir mes exemplaires, Et donc, à la fin Je ne peux pas vous parler en détail du contenu, n’ayant eu que le temps de la feuilleter. Elle parle de littérature fantastique, de la peur en particulier, et contient entre autres des articles signés par Guy Astic et Jean Marigny. La nouvelle que j’y publie, « Le jardin des silences », est sans doute ma préférée parmi celles que j’ai écrites cette année. J’ai eu du mal avec certains aspects, du coup la rédaction s’est étalée sur trois semaines plutôt que sur quelques jours, mais je crois que je suis contente du résultat. Pour ceux que la revue intéresserait, vous pouvez vous renseigner ici pour vous la procurer. Coïncidence (ou pas), le texte est né en grande partie d’une chanson des Kills, Rodeo Town – les Kills que j’ai presque vus en concert la semaine dernière au Bataclan. « Presque » parce que je suis arrivée trop tard, que j’étais au deuxième rang derrière un jeune homme très grand, parce que le public hystérique avait visiblement envie de se défouler et a commencé à pogoter avant le début du set. Difficile d’apprécier un concert quand on mesure 1m57 et qu’on se retrouve écrabouillée contre le premier rang au point qu’on peut à peine bouger les bras. De temps en temps, quand ça ne bousculait pas trop, j’apercevais Jamie Hince et Alison Mosshart entre deux têtes. Ils avaient l’air très en forme, très complices, et Alison était plus tigresse que jamais – j’ai pu l’observer plus calmement quand le public s’est un peu assagi pendant No wow. Beaucoup de gens s’accordaient à dire que le concert était génial. Je regrette d’autant plus de n’en avoir presque rien vu. D’autant que c’est la première fois que j’ai entendais en live Cat claw que j’adore – même si je l’avais voulu, je n’aurais pas pu faire des bonds partout tellement ça se bousculait. Je crois que j’ai un mauvais karma avec les Kills. Je ne me sens pas très à l’aise au milieu de leur public, peut-être parce que j’ai dix ans de plus que la moyenne d’âge de leurs fans. Je suis ravie d’avoir vu cette année au moins un concert d’eux qui était exceptionnel, la Black Session à la Maison de la radio. Ça rattrape les plans foireux comme celui-là.

 

C’est tout pour ce soir – et comme je m’y attendais, je me suis laissée entraînée à rédiger un longue entrée. Je posterai peut-être d’autres photos des Utopiales plus tard.

 

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Ellen Kushner à Paris

 

Quelques photos de la dédicace hier soir d’Ellen Kushner à la librairie Scylla (8 rue Riesener, 75012 Paris, très bonne adresse), suivie de l’enregistrement d’une interview pour l’émission Salle 101. L’ambiance était très chouette, très conviviale, c’était amusant de nous retrouver tous entassés dans la petite librairie (lecteurs, éditeurs et autres habitués des lieux), assis par terre pour certains, pour écouter religieusement l’interview avec l’impression de vivre un moment à part. Ellen Kushner nous a bluffés en répondant aux questions dans un français impeccable. Un peu plus tôt, elle nous avait lu des extraits de son roman À la pointe de l’épée dans les deux langues. Je n’ai encore jamais lu ses livres, bien que je connaisse son nom depuis longtemps, comme éditrice et comme auteur (tout comme celui de Delia Sherman qui l’accompagnait), mais ça ne m’a pas empêchée de trouver l’interview passionnante. Elle y a parlé notamment de la notion d’« interstitial arts » (qui correspond en gros à ce que Francis Berthelot appelle les « transfictions », ces littératures qui dépassent les frontières des genres) et de ses romans À la pointe de l’épée (qui vient de paraître chez Calmann-Lévy) et Thomas le rimeur. L’interview sera en écoute sur le site de la Salle 101 à partir de jeudi à cette adresse.

 

Ellen Kushner et Delia Sherman seront à partir de mercredi soir aux Utopiales de Nantes. Ça tombe bien, moi aussi (à partir de jeudi). On y sera très vite.



 

 

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Lendemain de concert, réveil difficile

À tous ceux qui estimaient que j’avais déjà beaucoup parlé ici de la musique des Dresden Dolls et d’Amanda Palmer et que ça devenait répétitif, je présente par avance mes plus plates excuses, mais vous n’en avez pas fini. Je crois que le personnage me fascine encore plus depuis l’interview d’avant-hier et le concert d’hier soir. Je me sens bizarrement un peu vide, comme souvent après un concert que j’attendais impatiemment et qui a été à la hauteur de mes espérances. Accessoirement, pour avoir pas mal lu son blog ces derniers mois, c’était bizarre de voir en vrai tous ces gens dont elle y parle à longueur de temps et que je ne connaissais qu’en photo, comme Zoë Keating et les quatre membres du Danger Ensemble.

J’ai rédigé un compte-rendu pour le Cargo, sauf que le webzine est en panne pour une durée indéterminée. Une fois n’est pas coutume, je publie donc le compte-rendu ici et je le rapatrierai le moment venu (sans doute un peu retouché). J’ai aussi posté quelques photos sur Flickr. Pour ceux qui voudraient se faire une idée plus précise de certains morceaux mentionnés ici, je vous renvoie à la série de vidéos tournée pour accompagner l’album et visible ici.

Je crois qu’il y a longtemps que je n’avais pas trouvé d’artistes avec qui je me sente autant en phase, c’est-à-dire fascinée à ce point aussi bien par la musique que par la personne qu’on devine derrière. Un peu comme le lien que je peux avoir à l’univers de PJ Harvey par exemple, dont j’admire la démarche générale autant que les albums. J’ai retrouvé un peu le même type d’ambiance au concert d’hier, comme explicité dans le compte-rendu.

Le compte-rendu, donc, avec quelques images :

Amanda Palmer, la Boule noire, 23/10/08

Quand Amanda Palmer nous avait annoncé en interview un spectacle théâtral un peu dingue, nous n’avions pas vraiment pris la mesure de ce que serait ce concert à la Boule noire, ni surtout de ce qu’apporterait la présence des quatre performers australiens formant le « Danger Ensemble« . C’était oublier le côté « artiste complète » qui est l’un des aspects les plus passionnants du personnage, pour qui la sortie d’un disque, par exemple, s’accompagne forcément d’un livre d’images en parallèle (celui de cet album solo est d’ailleurs co-signé par Neil Gaiman). Ceux qui s’attendaient hier à un véritable concert solo ont dû avoir une sacrée surprise.

 

 

On est frappés, dès notre arrivée, par l’ambiance qui règne à la Boule noire. De toute évidence, c’est un concert très attendu, par des fans de longue date autant que par des convertis récents. Certains ont traversé la France pour y assister. Il règne ce climat particulier qu’on rencontre aux concerts d’artistes qui font l’objet d’un culte similaire – on pense notamment à PJ Harvey, pour le mélange de surexcitation et de respect qu’on perçoit chez cette foule. Il faut avoir vu un public pourtant totalement surchauffé laisser PJ Harvey interpréter « To bring you my love » jusqu’à la toute dernière note dans un silence quasi religieux – c’était en 98 à la Cigale – pour comprendre pleinement ce que peut être le respect des fans vis-à-vis d’un artiste qu’ils vénèrent. On retrouve un peu de ça ici, ainsi que le sentiment d’une sorte de camaraderie unissant le public. C’est particulièrement frappant lors des premières parties, que la foule accueillera avec autant de patience que d’intérêt. Il faut dire qu’on a moins l’impression de voir des groupes catapultés sur scène par simple hasard de la programmation que des membres d’une même famille. Ou un spectacle de cirque, plutôt, dont le Monsieur Loyal serait Steven Mitchell Wright du Danger Ensemble, ce bonhomme à la bouille pas possible et à l’accent charmant qui vient à plusieurs reprises annoncer les numéros. Parmi les quatre artistes qui se succèdent pour interpréter deux ou trois morceaux chacun, plusieurs reviendront sur scène en compagnie d’Amanda Palmer. Zoë Keating qui parvient à créer une tension assez hallucinante avec ses solos de violoncelle envoûtants, et un Jason Webley déjanté qui implique le public de manière assez ludique sur une chanson où il le divise en deux parties pour lui faire interpréter d’un côté le chœur des trombones, de l’autre côté celui des violons.

 

 

Après avoir promis de revenir nous annoncer une nouvelle tragique, Steven Mitchell Wright se lance : « Amanda Fucking Palmer is dead », déclare-t-il avant d’entraîner le public à pousser des cris de tristesse et de joie mêlées. Le dernier morceau de Zoë Keating, qui conclut la première partie, est dédié à sa mémoire. Lorsque les quatre artistes du Danger Ensemble montent lentement sur scène dans une ambiance de funérailles, ils sont rejoints par une silhouette voilée qui est trahie par ses béquilles, pour ceux qui ne l’auraient pas reconnue (conséquence d’un petit accident survenu pendant la tournée). La silhouette s’installe derrière le clavier « Kurtweil » décoré de fleurs, elle se dévoile, et on reçoit comme un coup de poing les premières notes rageuses et intenses d’« Astronaut ».

 

 

Il faut avoir le sens du spectacle qui est celui d’Amanda Palmer pour réussir à offrir, malgré une jambe dans le plâtre, un concert aussi peu statique. Elle s’emballe et gesticule derrière son clavier, se fait parfois porter d’un bout à l’autre de la scène par ses partenaires et participe à la majeure partie des chorégraphies. Le tout début du concert, passé « Astronaut », est plutôt calme : un splendide « Ampersand », « Blake says », puis les choses sérieuses commencent. Elle annonce une chanson qui a failli ne pas figurer sur son album, écrite après la fusillade du lycée Columbine. Le violoniste Lyndon Chester égrène une liste de noms de victimes tandis que les membres du Danger Ensemble remontent sur scène pour y défiler lentement, mains sur la tête, déguisés en lycéens. Le moment est beau et grave, à l’image de la chanson. Surtout lorsque les quatre Australiens se laissent retomber à l’avant de la scène dans un ralenti hypnotique pour mimer la mort des victimes, le visage à trente centimètres à peine du premier rang, pendant qu’Amanda ponctue la chanson de « tick… tick… tick… » jusqu’au « boom » final et discret qui noue la gorge.

 

Le contraste avec « Guitar hero », juste après, est saisissant. On avait toujours soupçonné que ce serait une fabuleuse chanson de scène, mais le numéro visuel électrise encore davantage. Rejoints par Amanda à l’avant de la scène, les membres du Danger Ensemble chaussent de grosses lunettes noires à monture rouge et exécutent une chorégraphie rappelant le numéro de zombies de la vidéo tournée pour cette chanson. C’est l’un des premiers grands moments du concert. Le reste de la soirée ressemble à un jeu de chaises musicales où Amanda Palmer alternera les morceaux qu’elle joue seule au clavier, parfois accompagnée de Zoë Keating et de Lyndon Chester, et les numéros interprétés avec les performers australiens. Le tout avec une égale intensité. Dans la première catégorie, une splendide version de « Half Jack », et une reprise d’un morceau irlandais dont nous n’avons pas retenu les références, pendant lequel on la verra discrètement essuyer une larme qui a en passant fait couler son maquillage.

 

On prend conscience de l’impressionnant corpus de chansons qu’elle a déjà rassemblé en trois albums des Dresden Dolls et un album solo. Le répertoire se compose pour un tiers d’extraits de Who killed Amanda Palmer, pour un tiers de morceaux des Dresden Dolls, et pour un autre tiers de reprises parfois improbables. Le public accueille le tout avec un enthousiasme délirant qui a le bon goût de ne jamais sombrer dans l’hystérie. On est impressionné de l’entendre reprendre en chœur l’intégralité des paroles de « Coin-operated boy » (pendant laquelle les deux garçons du Danger Ensemble, munis de pancartes annonçant « Un bisou pour un sou », s’aventurent dans le public tandis que les deux filles les regardent s’éloigner d’un air désespéré). Mais c’est vrai que c’est irrésistible – la chanson elle-même, l’ambiance, le sentiment de connivence entre Amanda, son groupe et son public. Plus tard, tandis que les quatre Australiens, qui ne touchent pas d’argent sur cette tournée, passent quêter dans la foule, Amanda et Jason Webley interrompent en plein milieu une reprise du « grand maître zen » Bon Jovi pour débattre du sens de ses paroles.

 

On sent le spectacle devenir légèrement moins carré vers la fin. Le moment le plus improbable est sans doute le numéro de play-back sur « Umbrella », le tube R’n’B de Rihanna, sur fond de chorégraphie avec des parapluie qui se termine par une douche à la bière pour les premiers rangs. Au rappel, une superbe version du « Port d’Amsterdam » dans un français impeccable, avec Jason Webley à l’accordéon, tandis que Tora Hylands et Kat Cornwell du Danger Ensemble miment des prostituées à l’avant de la scène. Puis Jason et Amanda interprètent en duo l’« Elisa » de Gainsbourg repris en chœur par le public. Pour le dernier titre, un vote soumis à la foule – un morceau de l’album ou une reprise à l’ukulélé – fera pencher la balance vers la deuxième option. Ce sera « Creep » de Radiohead en solo, après qu’Amanda aura passé deux bonnes minutes à tenter d’accorder son instrument.

 

Après la fin du concert, les fans s’attardent, n’ont pas envie de quitter la salle. Ils savent qu’Amanda a coutume de prolonger les concerts par une séance de dédicaces. On la verra s’y prêter de bonne grâce, souriante et chaleureuse, pour signer albums et affiches et se laisser prendre en photo avec les gens. On quitte la salle ébloui, un peu étourdi en fait. Le concert est passé si vite qu’on ne remarque qu’a posteriori que peu de morceaux de l’album solo ont été interprétés. On le regrette un peu, d’autant qu’on aurait adoré vivre en live les deux tubes « Leeds United » et « Runs in the family ». Mais tel quel, c’était déjà un fabuleux spectacle dont on se souviendra longtemps.

 

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Bis repetita

Spéciale dédicace à Daylon, Epikt, rmd et au fan-club informel d’Amanda Palmer qui traîne dans le coin :

 

 

Quatre mois plus tard, on prend les mêmes et on recommence. Le Cargo (dont je ne donne pas le lien aujourd’hui vu qu’il est en panne) sera bientôt fier de vous présenter une interview vidéo d’environ un quart d’heure tournée aujourd’hui même. Moi qui étais frustrée qu’on n’ait pas pu filmer Amanda lors de l’interview précédente, vu que le personnage est assez savoureux, je suis sur un nuage. Et cette fois, j’ai pu prendre des photos.


N’ayant pas une grande habitude des interviews, j’ai trouvé assez rigolo de questionner deux fois la même personne à quatre mois d’intervalle. Ça devrait donner un résultat très différent de la première fois : entre temps, j’ai (beaucoup) écouté l’album, et on disposait d’un peu moins de temps cette fois-ci. Les questions portent de manière plus précise sur les chansons et sur la série de vidéos qui les accompagne. Du coup, les réponses sont plus brèves et s’enchaînent plus rapidement. Un fond de superstition m’empêche d’en dire plus avant d’avoir récupéré le fichier son pour réécouter et retranscrire tout ça, mais le résultat devrait être assez marrant.


Du coup, j’attends le concert de demain soir encore plus impatiemment. Détail intéressant : elle assure en ce moment tous ses concerts avec une jambe dans le plâtre suite à une rencontre malheureuse avec une voiture à Belfast, comme raconté sur son blog. Et elle affirme n’avoir quasiment rien changé à son jeu de scène depuis. Curieuse de voir ça.

 

Je vous laisse en attendant avec mon tube de ces dernières semaines. À demain, pour ceux qui seront à la Boule noire.

 


 

 

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